L' objectif d'all4shooters.com a été d'informer nos lecteurs sur les risques de la croisade idéologique de l'UE contre le plomb dans les munitions, sous couvert de préoccupations sanitaires et écologiques. Les chasseurs ne sont pas les seuls concernés, les tireurs sportifs le sont aussi! Mais il ne s'agit pas seulement d'un problème pour les amateurs d'armes. si une interdiction presque totale des munitions au plomb est désormais imminente, quel sera le prix (ou le préjudice) pour les travailleurs et les entreprises, pour l'économie et la société dans son ensemble ?
Garder l'espoir et jouer la montre ? De nombreuses associations se penchent actuellement sur l'interdiction du plomb dans les munitions et sur les conséquences pour la chasse, le tir sportif et l'industrie qui y est liée. Beaucoup de réflexions tournent autour de périodes de transition plus longues. De notre point de vue, l'accent n'est pas suffisamment mis sur un point, il n'existe actuellement aucune alternative équivalente au plomb la majorité des applications. Les aspects de l'impact des matériaux alternatifs (cuivre, zinc, fer, etc.) sur l'homme et l'environnement ne sont pas clairs non plus. Il est donc bien plus judicieux de s'engager pour la préservation du plomb et de convaincre l'ECHA que cette interdiction, avec toutes ses conséquences présentées ici, n'a aucun sens. C'est également l'objectif que devraient se fixer les associations et pas seulement essayer de négocier des périodes de transition plus longues.
+++ Mise à jour d'avril 2022 +++ Quel est le rapport entre les voitures électriques et l'interdiction du plomb dans les munitions ?
Lorsque nous parlons ici d'un agenda politique contre la chasse et contre les armes de chasse privées, certains peuvent penser qu'il s'agit d'une exagération. Si nous prenons un tout autre exemple, le secteur automobile, cela pourrait ouvrir les yeux de certains. Les voitures électriques ne devraient peut être ne plus être autorisées à circuler dans les centres-villes à l'avenir, pour une raison fallacieuse, les "particules fines". Ce fut d'abord l'interdiction des diesels Euro 5, puis celle des "voitures à combustion" et maintenant ce sont aussi les voitures électriques (dont on promeut la diffusion et que l'on encourage par l'Etat et les impôts) qu'un autre agenda politique veut chasser des centres-villes. Voyez-vous un parallèle avec l'interdiction du plomb dans les munitions ? D'abord le plomb, puis le cuivre, puis la chasse et les armes de sport? Tout fini par figurer sur la liste des interdictions de l'UE. Nous devrions donc prendre ce sujet très sérieusement!
Le Forum européen du tir sportif (ESSF, voir infos tout en bas) a fait le calcul très récemment dans un article publié sur le site d'Euractiv.
L'analyse économique de l'ESSF est alarmante, si l'interdiction quasi totale de l'utilisation de munitions au plomb entrait en vigueur, l'impact socio-économique sur l'industrie des munitions et des armes à feu et les secteurs connexes atteindrait jusqu'à 4 milliards d'euros et plus de 16000 emplois seraient perdus. Les coûts sociaux associés s'élèveraient à 1,4 milliard d'euros au total dans l'Espace économique européen (EEE). L'impact aurait également des conséquences pour les 10 millions de consommateurs de munitions, qui dépensent jusqu'à 20 milliards d'euros par an.
Environ 50 % du secteur subira de graves revers comme des fermetures d'entreprises.
"Lorsqu'une réforme radicale est sur le point d'être mise en œuvre et qu'elle doit impacter toute une industrie, il est essentiel d'évaluer précisément son impact et de fixer un calendrier approprié pour sa mise en œuvre afin de minimiser les éventuelles répercussions socio-économiques", écrivent les experts de l'ESSF. Malheureusement, le rapport de l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA), sur lequel se base l'interdiction du plomb, a sous-estimé ces deux aspects.
"Selon une enquête menée par l'IEACS et l'ESFAM auprès des fabricants d'armes à feu de l'EEE, jusqu'à la moitié de l'industrie devra faire face à de sérieux revers, voire à des fermetures d'entreprises, si la restriction entre en vigueur sans période de transition prolongée".
Pour se conformer à la restriction proposée, l'expérience montre que les acteurs du secteur devront mener d'importants travaux de recherche et de développement pendant une dizaine d'années afin de passer entièrement aux munitions sans plomb sans conséquences économiques négatives. Il est actuellement impossible de prédire si cela sera possible dans le domaine du sport. Les tests actuels avec des munitions sans plomb à percussion annulaire et des balles de carabine à air comprimé se sont révélés très insatisfaisants, de sorte que l'on peut dire qu'ils ne sont pas satisfaisants. Actuellement, il n'existe pas d'alternative au plomb dans les munitions dans ces domaines.
Pour mettre cela en perspective, il faut garder à l'esprit qu'il s'agit d'un secteur économique qui génère un chiffre d'affaires annuel d'environ 6 milliards d'euros et emploie près de 22 000 personnes.
L'ESSF écrit également: "Une mise en œuvre prématurée de la restriction mettrait en péril au moins la moitié (si ce n'est plus) des revenus et de l'emploi du secteur. Elle entraînerait la fermeture d'environ 20% des entreprises concernées, une perte financière annuelle pouvant atteindre 3 milliards d'euros et plus de 11.000 emplois seraient menacé. Ce qui entrainerait des coûts associés d'aide publique d'environ 800 millions d'euros qui seraient supportés par les contribuables de l'EEE".
Ce sont surtout les petits et moyens fabricants qui vendent principalement sur le marché européen qui en souffriront, ils seront contraints de cesser complètement leurs activités. En conséquence, 200 distributeurs, 14000 détaillants et plus de 300000 collectionneurs en Europe, dont l'activité dépend entièrement ou en grande partie du marché de la chasse ou du tir de loisir, sont également menacés.
"Comme l'a montré une enquête menée par l'AFEMS auprès de ses membres, l'approche de l'ECHA semble ignorer que la performance des munitions est déterminée par l'ensemble de leurs composants et qu'elles sont conçues pour des propriétés balistiques et d'impact spécifiques. La modification d'un seul composant dans cette équation implique nécessairement une refonte de l'ensemble. Par conséquent, un délai plus long est nécessaire pour concevoir, développer et vendre des quantités suffisantes de munitions afin de répondre à la demande actuelle".
La plupart des fabricants de munitions ne peuvent remplacer ces composants qu'à plus long terme (10 ans), certaines entreprises ne sont pas du tout en mesure de les remplacer. Les entreprises qui ne parviennent pas à remplacer immédiatement leurs produits ou à les vendre à des clients en dehors de l'EEE doivent arrêter leurs chaînes de production. Les conséquences socio-économiques ? Des pertes économiques annuelles pouvant atteindre 1 milliard d'euros, la perte de plus de 5000 emplois et des aides publiques associées de 600 millions d'euros dans l'Espace économique européen".
À qui profite une interdiction du plomb dans les munitions au niveau européen?
Si l'on additionne tous les effets négatifs de la restriction proposée sur les fabricants d'armes et de munitions, on obtient, comme indiqué ci-dessus, un montant total pouvant atteindre 4 milliards d'euros de pertes financières annuelles et la perte de plus de 16000 emplois, sachant que le soutien public dans l'EEE s'élèverait à 1,4 milliard d'euros. Mais ce n'est pas tout, parmi les autres facteurs de risque compliquant la situation, il y a la disponibilité (ou le manque) de matières premières alternatives au plomb, notamment le bismuth et le tungstène. "Alors que l'annexe D du rapport de l'ECHA affirme que ces deux métaux sont des 'substituts au plomb' dans les cartouches à grenaille, la Commission européenne, dans ses fiches sur les matières premières critiques pour 2020, conclut que la disponibilité de ces deux métaux est déjà critique et examine même les possibilités de substitution afin de réduire le risque". Eh bien, l'ECHA aurait mieux fait de lire les informations internes de l'UE...
De même, l'étain et l'acier, proposés comme alternatives au plomb dans les projectiles et les chevrotines, sont en grande partie importés de l'extérieur de l'EEE, principalement de Chine. "Cela signifierait pour le marché de l'UE une dépendance vis-à-vis des pays tiers en ce qui concerne l'approvisionnement de ces matériaux". Le fait que les matériaux mentionnés ici soient loin d'avoir les mêmes propriétés balistiques que le plomb n'est même pas pris en compte. Une portée réduite, une moins bonne couverture et une chasse non conforme aux règles d'éthique (p. ex. pour les canards) sont d'autres conséquences.
Il devrait être clair, que l'interdiction du plomb dans les munitions aura des conséquences immédiates pour nous tous. "Si l'interdiction proposée entre en vigueur sans mesures correctives appropriées, non seulement la chasse (comme nous l'avons déjà montré) et le tir sportif, mais aussi l'industrie et la société européennes devront payer un prix élevé", estime l'ESSF. Ici, nous ne parlons pas seulement des fabricants de munitions, mais aussi des fabricants d'armes, d'optiques et d'autres équipements. S'y ajoutent tous les niveaux du commerce et de la vente en gros.
Les fabricants de l'UE ne pourraient plus produire de munitions au plomb, même pour l'exportation vers les États-Unis ou d'autres marchés (qui ne sont pas menacés d'une interdiction du plomb)!
La question clé reste donc, à quoi cela sert-il, à qui profite-t-il vraiment ?
Une explication des abréviations pour une meilleure compréhension:
ECHA (Agence européenne des produits chimiques): Autorité mandatée par l'UE et basée à Helsinki pour mettre en œuvre la législation de l'UE sur les produits chimiques afin de protéger la santé et l'environnement.
ESSF (Forum européen du tir sportif): Fédération européenne d'associations de fabricants (armes civiles, munitions, accessoires) et d'organisations de tir sportif et de chasse, basée à Rome. Selon ses propres informations, l'ESSF compte 600000 collaborateurs dans toute l'Europe, un chiffre d'affaires annuel de 40 milliards d'euros, 14000 commerçants spécialisés, 300000 collectionneurs et environ dix millions de tireurs sportifs et de chasseurs.
EEE Espace économique européen(explication de l'UE). L'Espace économique européen (EEE) vise à étendre le marché intérieur de l'UE aux pays de l'Association européenne de libre-échange (AELE), comme la Suisse, la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein. Les pays actuels de l'AELE ne souhaitent pas adhérer à l'UE.